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Obstétrique

Publié le 23 oct 2023Lecture 6 min

Complications obstétricales de l’endométriose

Daniel ROTTEN, Paris
Complications obstétricales de l’endométriose

A quel point la grossesse peut-elle améliorer l'endométriose des femmes ? Et à l'inverse, dans quelle mesure cette maladie peut-elle constituer un facteur de risque chez les patientes enceintes ?

Les relations entre endométriose et grossesse sont complexes. La grossesse est habituellement considérée comme ayant un rôle bénéfique sur l’évolution de la maladie endométriosique. Le rôle délétère de l’endométriose sur la fertilité est bien documenté. Très exceptionnellement, des complications chirurgicales aiguës, par exemple digestives ou ovariennes, peuvent survenir pendant la grossesse. Enfin, l’endométriose est réputée entraîner une augmentation d’incidence de diverses pathologies spécifiques de la grossesse. La liste en est variée : accouchements prématurés surtout, mais aussi avortements spontanés, pathologie hypertensive, placenta prævia, hématome rétroplacentaire, diabète gestationnel, etc. Pour expliquer la survenue (éventuelle) de complications aussi diverses, certains ont proposé une théorie uniciste. Les anomalies biologiques de l’endométriose ne seraient pas limitées au tissu hétérotopique, mais concerneraient également l’endomètre intracavitaire. Une décidualisation anormale y ferait le lit d’un défaut d’invasion trophoblastique, ouvrant la porte au développement de complications multiples. Mais, méthodologie déficiente (études rétrospectives, groupes contrôles impropres…) et effectifs trop faibles, la littérature n’apporte pas de preuve décisive. Méthodes Le travail de Louis Marcellin et coll. portant sur les relations entre maladie endométriosique et risque de complications obstétricales répond à ces critiques. Sept maternités universitaires françaises ont participé à l’étude. La méthodologie est stricte. Elle inclut une catégorisation précise du stade de la maladie endométriosique et comporte un effectif de patientes conséquent. Les patientes retenues dans l’étude ont une grossesse monofœtale. L’inclusion se fait avant 22 semaines d’aménorrhée (SA), de manière prospective. Seules les patientes ayant accouché au-delà de ce terme sont retenues. Le groupe endométriose est constitué de 470 patientes. Le diagnostic repose sur l’analyse rétrospective des dossiers médicaux. Il est porté soit par imagerie (n = 171), soit par intervention (n = 299). Pour l’imagerie, le diagnostic repose sur des critères reconnus. Pour le diagnostic opératoire, le diagnostic repose sur une description exhaustive des lésions et leur confirmation histologique. L’existence possible de lésions résiduelles n’est pas prise en compte. Les lésions sont classées en 3 phénotypes de sévérité croissante : endométriose péritonéale superficielle isolée (n = 48), endométriome ovarien (n = 83), endométriose profonde (n = 339). En cas d’association de plusieurs types de lésions, le phénotype le plus sévère est retenu. Le groupe témoin est constitué de 881 patientes ayant une grossesse monofœtale non compliquée au moment de l’inclusion. Pour éviter l’inclusion de patientes ayant une endométriose méconnue, les femmes ayant des antécédents de dysménorrhée sévère et de dyspareunie profonde sont exclues. Durée de la grossesse La durée de la grossesse ne diffère pas entre les deux groupes (âge médian d’accouchement : 39 SA ; intervalle interquartile : 38-40). Il en est de même pour le taux global d’accouchements prématurés < 37 SA (7,2 % vs 6,0 %, NS). Il n’y a pas non plus de différence lorsqu’on considère séparément les accouchements prématurés spontanés (entrée en travail spontanée ou déclenchement après rupture prématurée des membranes) et les accouchements prématurés d’indication médicale (travail induit ou césarienne pour indication maternelle ou fœtale). Il n’y a pas non plus de différence entre les taux d’accouchements prématurés observés pour chacun des 3 phénotypes de maladie endométriosique et le groupe témoin. Le taux de menaces d’accouchement prématuré (MAP) ayant motivé une hospitalisation est plus élevé dans le groupe endométriose (8,2 % vs 4,9 %, p = 0,02). On peut envisager que l’état inflammatoire qui caractérise l’endométriose soit à l’origine de contractions utérines et de modifications du col. Mais ces MAP ne sont pas suivies d’une augmentation du taux effectif d’accouchements prématurés. L’explication la plus vraisemblable est donc un biais de prise en charge. L’endométriose étant réputée à l’origine d’un excès d’accouchements prématurés, le recours à une hospitalisation serait plus fréquent, malgré la faible efficacité de cette mesure. Mode d’accouchement On observe un excès d’accouchements par voie basse instrumentale et par césarienne. Comme pour les MAP, il est vraisemblable que cela réponde à une surestimation du haut risque chez les patientes du groupe endométriose.Les items suivants ont été analysés : rupture prématurée des membranes, hypertension gravidique et prééclampsie, hématome rétroplacentaire, placenta prævia, diabète gestationnel, hémorragie postpartum, endométrite postpartum. Parmi eux, un seul diffère entre les deux groupes lors du calcul brut, le taux de diabètes gestationnels (17,2 % vs 13,1 %, p = 0,04). Mais l’odds ratio calculé après ajustement pour les facteurs de confusion ne montre pas de différence. Pathologies obstétricales Les items suivants ont été analysés : rupture prématurée des membranes, hypertension gravidique et prééclampsie, hématome rétroplacentaire, placenta prævia, diabète gestationnel, hémorragie postpartum, endométrite postpartum. Parmi eux, un seul diffère entre les deux groupes lors du calcul brut, le taux de diabètes gestationnels (17,2 % vs 13,1 %, p = 0,04). Mais l’odds ratio calculé après ajustement pour les facteurs de confusion ne montre pas de différence. Paramètres néonatals Il existe un excès de nouveaunés hypotrophes dans le groupe endométriose (15,6 % vs 8,8 %, p < 0,001). La différence est plus nette en cas d’endométriome ou d’endométriose profonde. L’existence d’une association entre antécédent d’endométriose et retard de croissance a déjà été décrite dans la littérature, mais cette constatation ne reçoit pas d’explication et mérite de plus amples investigations. Commentaire De nombreuses études ont examiné l’existence de relations éventuelles entre endométriose et complications obstétricales. Leurs résultats ne sont pas toujours concordants. On en retient généralement qu’un antécédent d’endométriose augmente le risque d’accouchement prématuré, en particulier s’il s’agit d’endométriose profonde. En réalité, la majorité des études disponibles pèche par défauts méthodologiques, au premier rang desquels des groupes contrôles mal constitués et des effectifs faibles. Les résultats obtenus par Louis Marcellin et coll. apportent une mise au point documentée. Parmi les forces de leur étude, on peut relever le protocole prospectif d’inclusion des pa tientes, la caractérisation précise du phénotype de la maladie endométriosique et l’existence d’un groupe contrôle correctement sélectionné. Les auteurs montrent que l’on n’observe pas d’augmentation des diverses pathologies de la grossesse chez les femmes chez lesquelles une endométriose existait avant la grossesse. Cette constatation concerne le taux d’accouchements prématurés, mais aussi toute une variété de complications, placentaires, hypertensives ou autres. Elle vaut pour les trois phénotypes. Ce résultat est important. Il permet de diminuer l’anxiété des patientes au cours du déroulement de leur grossesse. Il permet également de rapprocher le suivi médical de celui d’une grossesse normale, et d’éviter un certain nombre de gestes ou décisions qui, pris par surprotection, s’avèrent inutiles et parfois délétères. Publié dans Gynécologie Pratique

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