Publié le 11 juin 2025Lecture 4 min
Dépression et grossesse : « non ce n’est pas normal de souffrir en silence, et oui ça se soigne »
Laura Bourgault, d’après la communication du Pr Anne Sauvaget, psychiatre au CHU de Nantes

Symptômes, diagnostic et prise en charge de la dépression pendant la grossesse : faisons le point grâce à l’expertise et l’expérience du Pr Anne Sauvaget, psychiatre au CHU de Nantes.
Interroger l’estime que la patiente a d’elle-même, ce n’est pas très compliqué et ça peut rapporter gros, introduit le Pr Anne Sauvaget.
Quels symptômes pour caractériser une dépression ?
En psychiatrie, le diagnostic de la dépression repose sur des critères très carrés. Pour assoir ce diagnostic d’épisode ou d’état dépressif caractérisé, cinq symptômes sont à repérer, lesquels doivent durer plus de 15 jours consécutives après un réel retentissement sur la vie professionnelle. C’est ce qui permet de faire la différence avec une tristesse passagère, des coups de mou, des coups de stress, des petits coups de burn-out que l’on peut tous traverser à un moment ou un autre. C’est à ce moment que la consultation du médecin traitant a toute sa place.
Dans le repérage des symptômes, il y a la tristesse, mais il faut savoir que les patientes n vont pas forcément prononcer le mot tristesse. Elles vont souvent être dans la dépréciation, formuler qu’elles sont nulles, qu’elles sont un point pour leur famille, qu’elles ne vont pas être une bonne maman. Parfois la tristesse peut aussi s’exprimer par le biais d’un douleur morale, auprès de femmes qui disent souffrir sans trop savoir de quoi. Un mal-être cachant de la tristesse peut aussi être exprimé. Il arrive aussi, et c’est un piège, que la patiente soit dans une situation d’anesthésie affective avec aucune émotion donc alors que l’on préfère en avoir, avec quelqu’un qui a accès aux larmes. Même en tant que psychiatre, il est possible de passer à côté du diagnostic car il peut être difficile à poser du fait de ce masque social., de ces dépressions souriantes, invisibles.
Evidemment, dès que des idées suicidaires sont formulées par le patient, il faut explorer le risque de dépression, même si toutes les patients n’auront pas ces idées et passages à l’acte évitable. On estime que 15% des patients dépressifs décéderont d’une cause par suicide.
Il ne faut pas non plus sous-estimer les troubles de l’attention, de la concentration et de la mémoire, en ayant bien en tête que la dépression se traduit par un manque énorme d’énergie à ces niveaux-là et donc d’interroger ces points.
Quand les patientes n’ont plus d’énergie, elles n’ont logiquement plus goût à rien : une anhédonie que le professionnel en santé mentale recherche, tout comme le sentiment de dévalorisation et de culpabilisation. Les troubles du sommeil, et en particulier les insomnies d’endormissement et des réveils nocturnes précoces associés aux angoisses, sont aussi caractéristiques. Tout comme la lenteur dans la gestuelle et le réflexion.
Des ressources en ligne
Depuis 2021, tout citoyen et a fortiori tout professionnel de santé peut composer le numéro 3114, 7 jours sur 7 et 24 h/24. Au bout de la ligne ? Des professionnels de psychiatrie et santé mentale, des psychologies ou des infirmiers qui peuvent répondre face au sentiment de solitude des professionnels confrontés à la détresse de leurs patientes.
Des conseils pour répondre aux idées suicidaires et aux phobies d’impulsion, des auto-questionnaires pour repérer le masque social que peuvent porter certaines femmes en souffrance pendant leur grossesse, et des idées de formations sont aussi proposées sur le site 3114. Une sensibilisation essentielle pour se sentir plus à l’aise avec ces questions psychiatriques dans le domaine de la périnatalité, de désamorcer des situations.
Sur YouTube, la vidéo « Et toi ça va ? » a été réalisée dans un but pédagogique pour informer les professionnels de santé et les familles sur la dépression. Et découdre le bienfondé des phrases malvenues pour les patientes : « tu n’as qu’à te bouger. C’est normal tu es stressé, ça arrive à tout le monde. Or non, ce n’est pas normal d’être au fond du trouve, ce n’est pas normal de souffrir en silence, ce n’est pas normal d’avoir envie de rien, ce n’est pas normal de perdre de l’intérêt. Ça s’appelle une dépression et ça se soigne. Et ça n’est pas dans la tête, c’est le corps tout entier. Ce n’est pas une maladie de la psyché logé je ne sais pas où. Personne ne remet en cause l’existence d’un cancer. Certes en tant que psychiatre nous n’avons de biologie mais on a la clinique. Des propos simples et caricaturaux, mais en tant que soignants il faut être à l’aise avec ces notions pour que nos patientes et nos patients puissent être entendus ».
Le 15 et les urgences psychiatriques restent le premier recours en cas d’urgences.
Conclusions
Les principaux symptômes de la dépression relève d’une fatigue, l’angoisse, la dépréciation, les phobies d’impulsion et le masque social
Les troubles du sommeil, la lenteur dans les mouvements et à la réflexion, les troubles de la mémoire font aussi parti des symptômes associés à une dépression
La dépression peut être caractérisée après 15 semaines consécutives de symptômes invalidants sur le plan professionnel
Si une idée suicidaire est formulée, le risque de dépression doit être évalué
Des ressources comme le 3114 permettent aux soignants de la périnatalité de poser leurs questions aux professionnels de la santé mentale
*hors situation de périnatalité, cet article concerne aussi le repérage et la prise en charge de la dépression paternelle
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