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Médicament

Publié le 02 aoû 2022Lecture 4 min

Retour sur les dangers de l’exposition prénatale au topiramate

Isabelle MERESSE, Bordeaux
Retour sur les dangers de l’exposition prénatale au topiramate

A quel point l'exposition in utero à certains traitements antiépileptiques en monothérapie à base de topiromate et de valproate, et en bithérapie, induisent-ils un sur-risque de troubles neurodéveloppementaux (troubles du spectre autistique, déficience intellectuelle) ? 

Les femmes atteintes d'épilepsie nécessitent fréquemment un traitement antiépileptique (TAE), y compris pendant la grossesse. Si l’arrêt des TAE au cours de la grossesse expose à des crises et à une majoration de la mortalité maternelle, on sait aussi que certains TAE sont tératogènes et pourraient majorer le risque de troubles neurodéveloppementaux. Ces éléments placent les patientes et les médecins dans une situation difficile. Une étude scandinave a voulu déterminer si les enfants exposés avant la naissance aux TAE en monothérapie et en bithérapie présentent un risque accru de troubles neurodéveloppementaux. Une étude de cohorte de grande ampleur Cette étude de cohorte basée sur la population exploite les données des registres de santé du Danemark, de la Finlande, de l'Islande, de la Norvège et de la Suède (1996 -2017 ; analyse en février 2022), en particulier le registre nordique des médicaments antiépileptiques pendant la grossesse (SCAN-AED). Sur les 4 702 774 enfants nés vivants pendant cette période, avec des données de prescription maternelle disponibles, les enfants issus de grossesse multiple ou présentant des troubles chromosomiques ou une durée de grossesse incertaine ont été exclus (n = 207 848). L’exposition prénatale aux 10 monothérapies et aux 5 bithérapies anti-épileptiques les plus fréquemment utilisées a été déterminée à partir des ordonnances maternelles entre la dernière période menstruelle et la naissance. Les troubles neurodéveloppementaux ont été diagnostiqués par des pédopsychiatres et des psychologues dans des établissements de santé spécialisés. L'incidence cumulée à l'âge de 8 ans chez les enfants exposés à un TAE prénatal et non exposés a été évaluée. Les rapports de risque ajustés (RRa) avec intervalle de confiance (IC) à 95 %, pour les troubles du spectre autistique (TSA), la déficience intellectuelle (DI) ou tout trouble neurodéveloppemental (TSA et/ou DI, trouble envahissant du développement…) ont été obtenus à l’aide de la régression de Cox ajustée pour les facteurs confondants potentiels. Une augmentation des troubles neurodéveloppementaux Au total, 4 494 926 enfants ont été inclus dont 2 306 993 (51,3 %) de garçons et l'âge médian à la fin du suivi était de 8 (4,0-12,1) ans ; 24 825 enfants (0,6 %) ont été exposés avant la naissance aux TAE, dont 16 170 nés de mères épileptiques. Parmi 21 634 enfants de mères épileptiques non exposés à des TAE, 1,5 % avaient un diagnostic de TSA et 0,8 % de DI à l'âge de 8 ans. Chez les enfants du même âge de mères épileptiques exposées au topiramate et au valproate en monothérapie, 4,3 % et 2,7 %, respectivement, avaient un TSA, et 3,1 % et 2,4 % avaient une DI. Les RRa pour le TSA et la DI après exposition au topiramate étaient respectivement de 2,8 (IC à 95 %, 1,4-5,7) et 3,5 (IC à 95 %, 1,4-8,6) pour des posologies à partir de 100 mg/jour et après exposition au valproate étaient de 2,4 (IC à 95 %, 1,7-3,3) et 2,5 (IC à 95 %, 1,7-3,7). Les RRa augmentaient avec des doses plus élevées de TAE. Certaines bithérapies ont été associées à un risque accru de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants : lévétiracétam – carbamazépine, incidence cumulée sur 8 ans, 5,7 % (RRa, 3,5 ; IC à 95 %, 1,5-8,2) ; lamotrigine – topiramate, incidence cumulée sur 8 ans, 7,5 % (RRa, 2,4 ; IC à 95 %, 1,1-4,9). En revanche, aucune majoration du risque n'a été associée à la bithérapie lévétiracétam - lamotrigine (incidence cumulée sur 8 ans, 1,6 % ; RRa, 0,9 ; IC à 95 %, 0,3-2,5) ni après une exposition prénatale à une monothérapie par lamotrigine, lévétiracétam, carbamazépine, oxcarbazépine, gapapentine, prégabaline, clonazépam ou phénobarbital (IC à 95 %, 1,1-4,9). Quelle alternative pendant la grossesse ? Il s'agit de la plus grande étude s’intéressant aux troubles neurodéveloppementaux après une exposition prénatale à des TAE à ce jour. Certaines limites peuvent être pointées, comme la sélection des naissances vivantes qui peut masquer des morts fœtales causées par des effets toxiques, la collecte de prescriptions qui ne permet pas de savoir si les femmes ont pris le traitement ni quand. L'exposition prénatale au topiramate et au valproate est apparue associée à un risque de TSA et de DI, qui augmentait avec la dose. Les bithérapies étaient également associées à des troubles neurodéveloppementaux, à l'exception de lamotrigine - lévétiracétam. Celle-ci devrait faire l'objet d'études plus approfondies pour en déterminer l'innocuité et l'efficacité pendant la grossesse. Suite aux avertissements réglementaires mettant en garde contre l'utilisation du valproate chez les femmes en âge de procréer, des données de sécurité sont nécessaires pour les options thérapeutiques alternatives. Comme le valproate, le topiramate est indiqué dans l’épilepsie partielle et généralisée et le traitement de fond de la migraine. Cependant, ces résultats ne suggèrent pas que le topiramate soit une alternative sûre au valproate. Les femmes en âge de procréer recevant du topiramate doivent être informées des risques potentiels, et ceux-ci doivent être mis en balance avec les avantages et les options de traitement disponibles.

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